Un café & de la musique à Narbonne : rencontre avec Pierre-Marie Camper du Percolateur

Pour cette interview, on vous emmène en Occitanie, pour découvrir le chouette projet de Pierre-Marie Camper : Le Percolateur. L’idée, c’est de boire du café local en écoutant de la musique de choix. Pour que la sélection raffinée du Percolateur viennent aux oreilles des habitants de la région, Pierre-Marie a investi dans un triporteur qui permet de transporter ces découvertes. On lui a posé des questions sur la musique, le café et également le crowdfunding et l’égalité homme-femme : on ne vous en dit pas plus, bonne lecture !

Pouvez-vous nous présenter le Percolateur et ses différentes missions ?

« Le Percolateur » est un projet alliant deux cultures. Celles de la musique indépendante et du café de spécialité. Avec mon chariot ambulant, mes platines et ma machine à expresso, je propose sur Narbonne et l’ensemble de la région Occitanie une sélection de vinyles et de CD à l’écoute et à la vente, et du café de torréfaction artisanale à la dégustation (Expressos & Méthodes douces). J’investis les lieux du quotidien tels les médiathèques, marchés, commerces, coiffeurs, cafés, festivals, entreprises et même chez les particuliers, afin d’y créer un moment de convivialité et de découvertes musicales et caféinées.

Quels sont les types d’artistes que vous dénichez et que vous faîtes partager avec votre café nomade ?

J’ai une sélection Jazz, Monde, Electro, Chanson, Baroque. Je suis un boulimique radiophonique. J’écoute FIP, radio Néo, parfois Rinse. Je collecte ce qui me fait vibrer et je constitue mon catalogue par ce biais. Je suis donc plus un collecteur qu’un dénicheur. Parfois en fouillant sur le net, ou après un festival, un voyage, je me constitue une nouvelle base de données qui me donne du souffle et me permet de proposer un axe de découvertes. Depuis que j’ai démarré mon activité de disquaire le contact direct avec les distributeurs indépendants me donne encore plus de matière.

Vous êtes présent sur la région de Narbonne et partez à la rencontre du public avec du café et de la musique. Quelle est la motivation derrière ces actions culturelles ?

La motivation première du projet est de fournir un travail indépendant en lien avec différents acteurs indépendants. La dimension café est portée par des torréfacteurs artisanaux locaux (Toulouse-Café Négril- Finnca, Montpellier-Café Bun, Barcelone-Esperanza Café), et un ensemble de savoir-faire tels que les biscuits, thés, tisanes, chocolats. Du côté de la musique, la richesse de l’édition indépendante est telle que le métier de disquaire prend son sens par la connaissance de cette dernière et du conseil apporté auprès de la clientèle. Le plaisir de porter un projet culturel et commercial s’épanouit dans le lien social. Les gens viennent passer un moment de convivialité, échanger autour de l’origine d’un café, comme de l’histoire d’un projet musical.

L’autre grand axe du projet est plus global et concerne le rôle commerce de proximité dans la dynamisation des centres villes et des zones rurales. L’urbanisation, l’artificialisation de nos terres agricoles en zones d’activités à vision court terme, l’utilisation de la voiture au quotidien et la place qu’elle prend dans nos espaces est un sujet souvent éludé par les décisionnaires. L’objectif est d’aller à contre courant, de sensibiliser aux déplacements doux, de proposer des événements dans les commerces de centres villes en y développant une symbiose non dénuée de sens. Une mobilité douce, c’est militer pour la vitalité de la ville et pour le commerce de proximité. La voiture reste un outil indispensable à l’épanouissement de l’activité, en particulier pour porter l’activité dans les zones rurales.

Sujet qui nous tient à cœur chez nüagency : vous avez récemment organisé un événement de sensibilisation auprès de collégiens et lycéens pour mettre en avant la place des femmes dans la musique, à travers une session d’écoute. En quoi ce sujet vous a-t-il paru important et comment avez-vous réalisé votre sélection ?

J’ai grandi avec trois sœurs et j’ai toujours été sensible à la normalité de notre « non différence ». Cependant, cela ne m’a pas empêché adolescent d’avoir eu des a priori et des réflexions maladroites. Comme l’on peut considérer que les différences sociales des femmes et des hommes sont des constructions, et non un fait inné lié à la différence physiologique, je trouve important de participer à la construction d’une égalité des genres. FACE (Fondation Agir contre l’Exclusion) qui m’a fait cette demande est une association très complète dans sa lutte contre les discriminations car elle touche beaucoup d’acteurs. Les entreprises, les collèges, les lycées, les demandeurs d’emplois parfois en grande précarité, et les porteurs de projet, tous sont sensibilisés à la mise en pratique de devoirs, et la revendication de droits.

Pour cette sélection j’ai pris appui sur des repères. Mon père qui a une grande culture de la période baroque, que ce soit dans ses compositeurs.trices que dans ses interprètes (Marie-Claire Alain). Le collectif Arandel qui a publié ce mix « The Electro ladyland mixtape » dédié aux pionnières de la musique électronique. Le festival rennais Maintenant qui prend le parti selon les éditions de proposer des nuits électroniques portées par des femmes telles Helena Hauff en 2014, ou Dr Rubinstein en 2016. Ou tout simplement ma compagne qui m’a fait découvrir Emilie Chick au domaine d’Ô pour le fête de la musique 2012. Ça peut paraître fou de devoir faire des sélections spéciale « artistes féminines », mais c’est ce qui semble aujourd’hui donner leur place à des artistes qualifiées non par leur genre par leur qualité artistique dans un paysage trop souvent masculin. Puissions-nous rapidement ne plus avoir à le faire.

Vous avez mis en place une campagne Ulule qui s’est terminé au mois de mars dernier, afin de financer un triporteur, capable de transporter votre structure nomade. Quels sont les enseignements que vous avez tirés de cette campagne de crowdfunding ?

J’étais un peu réticent à lancer une campagne au démarrage de mon activité. Je pensais devoir faire mes preuves avant de solliciter les gens. Les amis, les organismes accompagnateurs, et la frilosité des organismes financeurs m’ont invité à y aller. J’ai donc construit une véritable campagne de communication qui a donné du souffle au projet et a permis le financement d’un vélo triporteur à assistance électrique. Cela a permis à mon infographiste (Alexis Camper) d’avoir de la matière pour créer une identité visuelle, et j’ai pu convaincre de nouveaux partenaires à me suivre dans l’aventure. Aujourd’hui la campagne est un outil pour faire connaître mon catalogue musical et mes cafés par le biais des contreparties. Cela donne une dynamique non négligeable dans la constitution d’une clientèle fidèle et convaincue.

Un dernier mot pour la fin ?

J’espère que la saison 2017-2018 sera l’occasion de créer de nouveau partenariats tant musicaux que caféinés, et de pouvoir poser mon chariot à l’occasion d’événements sur l’ensemble de la région Occitanie. En attendant, je vous invite à venir découvrir un festival de chanson francophone, cirque et arts de la rue qui se déroule à Langogne en Lozère : Festiv’Allier du 2 au 5 Août prochain. Une pépite indépendante pour notre région à laquelle j’aurai le plaisir de participer.

Retrouvez toute l’actualité du Percolateur sur FacebookTwitter et son site Internet.

Crédits photo : Nicky Rasa & Sabine Tran

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